Sujet : Transmartinique (134 km / 5000 m D+)
Les 7 et 8 décembre 2019, j'ai fait la Transmartinique en 41h44mn en me classant 141ème sur 242 partants et 169 finishers (73 abandons). Comme cela est comptabilisé par le club, je précise qu’il s’agit là de mon 12ème dossard pour l’année 2019.
Ce trail se partage en 4 types de paysage : montagneux (montagne Pelée), forêt tropicale, bananeraies / champs de canne à sucre et côte (plages et rochers). La majeure partie de la dénivelée est effectuée dans la 1ère moitié de course.
C’est une des courses les plus difficiles que j’ai pu faire, plus dure que la Diagonale à mon goût, même si la distance et la dénivelée sont moindres. Je pensais que la difficulté principale viendrait du climat chaud et humide (température et hygrométrie supérieures à La Réunion). En fait non, les ¾ de la course se font dans des zones boueuses dans lesquelles on laisse beaucoup d’énergie, si bien qu’il est difficile « d’envoyer » dans la 2ème moitié de la course pourtant très roulante. Je savais que le terrain serait gras et que certaines portions seraient boueuses, mais pas à ce point-là. « Si j’aurais su, j’aurais pas v’nu ! ». Mais je suis venu, je l’ai fait et je ne le regrette pas.
Le départ se fait à Grand Rivière à minuit depuis le bord de mer, l’attente du départ en essayant de se reposer est longue. On attaque directement par l’ascension de la montagne Pelée (1397 m). Très vite, c’est l’étuve, je sens la température corporelle monter, c’est étouffant. Au bout de 20 mn de course, 1ère averse ! Ca fait du bien, mais ça y est, les pieds sont mouillés, et ils le resteront jusqu’à Saint-Joseph, km 54, après avoir pris d’autres averses, pataugé dans la boue et traversé des gués.
On entend le vent souffler, mais dans la forêt, on le sent à peine. Au bout d’un certain temps, au sortir de la forêt, le vent souffle très fort, mais ça fait du bien. Je suis en débardeur, mais je n’aurai pas besoin de sortir le coupe-vent. Entre le nuage qui accroche la montagne Pelée et le brouillard, on ne voit pas grand-chose. On devine que l’on est sur une arête (sans doute le bord du cratère), on voit juste le départ d’une pente très raide de chaque côté. Ambiance haute montagne !
C’est déjà très boueux. Après 10 km d’ascension, enfin le sommet ! On redescend 500 m de dénivelée sur 2 km jusqu’à un abri-refuge. C’est le km 12, pour moi, il s’est déjà écoulé 3h27, je suis 135ème.
La descente continue sur 400 m, puis ça remontera et descendra 6 fois sur plusieurs centaines de mètres jusqu’à Saint-Joseph. C’est souvent assez raide, toujours très boueux, il faut parfois se hisser ou descendre en utilisant des cordes installées pour la circonstance, elles-mêmes glissantes car enduites de boue.
A l’approche de Saint-Joseph, le parcours sort de la forêt et se situe sur une crête dégagée. Sur la gauche, on voit l’océan atlantique et sur la droite, la mer des Caraïbes. C’est magnifique !
Au contrôle du km 35, cela fait 9h07 que je suis en course, je suis 111ème, ce sera mon meilleur classement. J’arrive donc ensuite à Saint-Joseph, km 54, 14h07 de course, 120ème. C’est une des 2 bases-vie de la course comprenant un gros ravitaillement, douches, médecins, kinés, podologues …, j’y retrouve aussi avec grand plaisir ma compagne. Mais il nous est d’abord imposé de laver nos chaussures et de nous doucher entièrement à cause du leptospire, dangereuse bactérie très résistante en milieu humide, puis de voir un médecin après prise de tension, température et examen de la circulation sanguine. J’y retrouve également mon sac d’allègement qui me suit sur plusieurs ravitaillements et me permet, entre autre, de mettre des chaussettes et des chaussures sèches. Quel bonheur !
La portion suivante jusqu’au Vauclin (km 92) est plus roulante que la précédente. Les chemins traversant les bananeraies et les champs de canne sont généralement praticables. J’en profite donc pour courir aussi souvent que possible. Mais à chaque pas dans la boue, le fait de s’enfoncer, de glisser, la peur de tomber, l’effet ventouse quand on lève le pied, sont autant de mouvements qui m’ont rapidement fatigué les jambes. Heureusement que j’avais les bâtons ! Parfois, des chaussures sont restées collées dans la boue, mais pas pour moi. Portion plus roulante, et pourtant, encore 2 longues montées avec des passages assez raides et bien glissants. Sur cette portion, je me serai reposer 2 fois 30 mn.
Quand j’arrive au Vauclin, mes pieds ont tellement macérés dans des chaussettes mouillées et boueuses que j’ai attrapé des ampoules, une derrière chaque talon et une sous chaque plante de pied. A titre de comparaison, à la diagonale, j’avais fini sans aucune ampoule ni ongle noir. Je récupère mon sac d’allègement et, avant d’aller au ravito, je vais directement voir le podologue car il n’y avait pas trop d’attente. Après m’avoir percé les ampoules, il m’explique que, pour celle se trouvant sous ma plante de pied droite, il doit recoller les peaux. Il appuie dessus avec ses 2 pouces, ça me fait terriblement mal, mon estomac et ma tête tournent, puis je tombe dans les pommes. Je me réveille une dizaine de minutes plus tard en PLS, le podologue me fait boire de l’eau et manger du sucre, puis me laisse me reposer. Le médecin, arrivé ensuite, m’explique que, comme j’ai fait un malaise, il ne me laissera sans doute pas repartir, en tout cas pas sans m’avoir examiné. Dans ma tête, les boules !!! Il m’envoie manger pour reprendre des forces et me dit de repasser après. Quand je reviens, il me dit qu’il me trouve encore fébrile, je lui dis que je me sens de repartir. Il me fait courir 100 m, puis me prend tension, pouls et température. Tout est ok, je souffle (fin de la frayeur) et je repars.
Quand j’arrive à Macabou, j’ai parcouru 102 km en 33h11, je suis bien loin de mes 100 km en 23h31 de la CCC ! Il reste 32 km le long de l’océan atlantique, puis de la mer des Caraïbes. C’est sec et quasiment plat, mais je ne courrai presque plus. J’ai les cuisses dures comme du béton, j’ai mal aux pieds à cause de mes ampoules, mais également parce qu’avec la chaleur, ils ont gonflé et les chaussures me serrent. Mais je veux finir ! Au rythme où je vais, j’ai le temps d’admirer les paysages, c’est magnifique ! A 9 km de l’arrivée, il faut traverser un passage en passant dans un mètre d’eau. Ça fait du bien aux jambes, mais il faut ensuite continuer à nouveau avec les pieds mouillés. J’ai terriblement mal aux pieds, je n’arrive pas à remettre du rythme, je me fais doubler par 2 jeunes qui m’expliquent dédaigneusement que c’est dans la tête. Mais à 1 km de l’arrivée, je reviens sur eux, ils coincent, je les double avec le même dédain. Je me retourne plusieurs fois pour voir s’ils reviennent sur moi et j’aperçois alors d’autres couleurs de maillots qui se rapprochent. Alors, à ma grande surprise et dans un sursaut d’orgueil, je retrouve la force de courir pour les 200 derniers mètres.
Pas mécontent d’arriver, ravi d’être finisher d’une telle épreuve, et encore plus ravi d’enlever mes chaussures … Après avoir retrouvé ma compagne, m’être restauré et fait masser, je passerai à nouveau un bon moment avec un podologue. Je n’avais jamais eu les pieds dans un tel état !
Je ne serai pas au repas du club car je suis encore pour 2 semaines à la Martinique. J’en suis un peu désolé, mais juste un peu … Bonne soirée et bon appétit !